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    Bienvenue dans mes textes, visiteur. Ici, tu trouveras principalement mes One Shot. En ce moment, tu peux trouver en ligne :

    Quatres jours avant la fin du monde. 11/2012

    Perle 08/2012

    En espérant que tu passeras un agréable moment en me lisant. Bien à toi.

    Nolwy


  • Perle


    Elle était seule, sur cette piste immense. Elle regarda brièvement autour d’elle, puis baissa les yeux immédiatement. Elle n’avait pas posé le regard sur moi. Elle avait peur, et pour cause, c’était la première fois pour elle. Elle attendait le signal qui marquerait le début de sa prestation, un peu perdue, mais déterminée à se montrer à la hauteur. Déterminée à ne pas me décevoir. Je savais qu’elle ne le ferait pas, elle était parfaite. La foule se tut. La première note sonna : le spectacle allait commencer.

     

    Je sentais que sa terreur était toujours présente, ancrée dans ses tripes, mais elle n’en montra rien. Ses pas s’exécutèrent à la perfection reflétant une cruelle émotion sur son visage angélique. Ses traits se crispèrent et je sentis sa douleur. Aussitôt, j'affaissai mon regard. J’ignorai la raison pour laquelle j’étais incapable d’observer un spectacle que j’avais moi-même chorégraphié, que je connaissais par cœur. J’ordonnai à mes yeux de ne pas quitter la créature divine qui tordait son corps dans des courbes parfaites et improbables, mais ils refusaient d’obéir. J’étais plus que déconcertée, incapable de mettre un nom sur cette vague de sentiments qui m’envahissaient malgré moi. Etait-ce à cause de sa maladie ? Est-ce que je compatissais de savoir que chacun de ses pas étaient une torture pour elle ? Etait-ce parce que je savais que cette première prestation publique serait aussi sa dernière ? Ou bien était-ce parce que malgré la souffrance qu’elle éprouvait, elle continuait à effectuer chaque pas avec autant de grâce que de précision, ce qui transformait cette danse somptueuse en émerveillement fatal ?

     

    Pourtant, je ne la connaissais même pas. J’avais assisté à quelques répétitions, mais je ne savais rien de cette nouvelle recrue. Pas même son nom.

     

    Soudain, la musique s’arrêta tandis que la foule retenait son souffle. Paniquée, j’osai enfin regarder la scène qui se dressait un peu plus bas, prête à affronter un cadavre gisant sur l’estrade. Son corps plein de vie était immobile, en parfaite harmonie avec ce silence qui ne devait pas durer. Un son grave et rapide retentit -sans doute un coup de tambour- et elle posa ses grands yeux émeraudes sur les miens d’une banalité déconcertante. Je me senti submergée. Elle souffla trois mots. Je ne les entendis pas, mais je savais qu’ils m’étaient adressés. Je ne pouvais empêcher mon cœur de battre plus fort que nécessaire. La musique reprit pour accompagner son agonie dansée.

     

    Cette fois, je ne pus détacher mes yeux de la jeune fille dont chaque mouvement caressait l’air d’une infinie douceur. Elle était si légère qu’on croyait par moment la voir voler. Elle violait toutes les lois de la physique. Ses gestes sensuels me semblaient érotiques et c’est alors que je me rendis compte à quel point elle était belle. Elle était la perfection incarnée. Plus le temps s’écoulait, plus la musique augmentait en intensité. Je crus reconnaître au fond de moi un désir charnel que je n’avais pas éprouvé depuis longtemps. Enfin, elle brisa son corps dans une cambrure sublime pendant que des explosions de paillettes envahirent la scène. Je fus la seule à entendre son cri avant qu’elle ne disparaisse, littéralement. Ce cri m’avait pris par les entrailles et me fis monter les larmes aux yeux. Tout s’était passé si vite. La foule se levait pour acclamer la beauté de la représentation à laquelle ils venaient d’assister. Leurs hurlements jubilatoires firent couler mes larmes, sans que je puisse les retenir.

     

    Je me levai d’un coup impulsif et me mis à courir entre les rangées de spectateurs, le plus vite que mon corps me le permettait, bousculant au passage des dizaines d’inconnus. Je me fichais de me prendre les murs, de tomber des escaliers, et d’arriver en trombe dans des vestiaires où je n’étais pas attendue. Je ne savais pas comment, mais je devinais exactement où elle était. J’entrai dans une petite pièce complètement vide à l’exception du corps sans vie qui reposait au sol glacé.

     

    Je me jetais sur elle et l’enveloppai dans mes bras. Elle était si pâle… Elle peinait à ouvrir les yeux. Il lui fallu des efforts surhumains pour articuler quelques mots à peine audible. Trois mots que je n’entendis pas. Je décidai donc de parler, pour l’empêcher de me quitter.

    - Comment t’appelles-tu ?

    - Perle.

    Ce nom lui allait si bien.

    - Quel âge as-tu ?

    - Seize ans… Vous… vous êtes... fière... de moi ?

    Mes yeux s’écarquillèrent et je laissai mes larmes couler sur son visage terne.

    - Plus que tu ne peux te l’imaginer. Tellement qu’il n’y a aucun mot pour le dire.

    Elle m’offrit alors un sourire radieux. Comment tant de beauté pouvait-elle être emmagasinée dans un corps si fragile ? Elle commençait à perdre connaissance. Mes lèvres prirent subitement possession des siennes. Un élan de passion s’empara de mon corps, mais je savais que la vie abandonnerait celle qui serait devenue mon amante avant la fin du baiser. Elle ferma les yeux, heureuse, apaisée… et morte.

     

    « Je vous aime. »

     

    Si seulement j’avais pu entendre ces trois mots.

     

    [One Shot] Perle

     

    Nolwy ©


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